30 mai 2007

L'évolutionnisme du créationnisme









Le créationnisme, qui considère que l’homme, les animaux, les plantes, la Terre, l’univers etc… sont l’œuvre d’un Créateur, reste une croyance qui comme toutes les croyances fait appel à la foi où à l’un de ses sous-produits, comme la « conviction », le « sentiment profond » voire « l’intuition ». Pas besoin de la justifier, de l’expliquer, de la mettre en équation pour la prouver, tant foi et démonstration scientifique sont par nature, antinomiques. Et pourtant, c’est bien là une des plus importantes occupations des créationnistes : la création peut être expliquée par l’évolution. Cette entreprise est surtout menée avec assiduité aux Etats-Unis par les fondamentalistes qui vont jusqu’à considérer que la Création s’est bien faite en 6 jours de 24 heures selon l’ordre indiqué par la Genèse. D’autres comme les Témoins de Jéhovah font quelques concessions sur ce temps générateur du Tout mais considèrent eux aussi que la Création peut s’expliquer par la science. Enfin, les courants les plus modérés sont notamment représentés par l’église catholique qui pourtant, jusqu’à une encyclique du Pape en 1996 ne reconnaissait pas la théorie de l’évolution. Cette reconnaissance tardive n’avait pas empêché d’illustres dévots comme Theillard de Chardin d’anticiper ce revirement en tentant le mariage contre-nature du créationnisme et de l’évolutionnisme.

Dernièrement, c’est la réédition d’un petit ouvrage des éditions du Cerf qui m’a ramené sur ce terrain. En 1984 dans sa première édition, l’ouvrage s’intitulait « Pour lire la Création dans l’évolution ». L’objectif était de donner aux catholiques quelques clés pour accepter la théorie de l’évolution sans pour autant remettre en question ses convictions religieuses. En résumé, l’évolution ok, mais dirigée par un Grand Ordonnateur et vers plus de complexité, c'est-à-dire l’Homme. Une tendance à la complexification démentie par la réédition de 2007, dans laquelle le titre a lui, évolué vers plus de simplicité. Il est passé de « Pour lire la création dans l’évolution » à « Pour lire la création, l’évolution ». En évolutionniste primaire, je vois dans la disparition de ce « dans » un schéma classique de la théorie de l’évolution. Le titre a été victime d’un processus évolutif simplificateur. L’un des ses attributs ancestraux, le fameux « dans », ne servant plus, il a été contre-sélectionné. D’où sa disparition. Une adaptation logique à un environnement devenu en deux décennies, de plus en plus hostile au créationnisme.

Ce changement est un véritable saut évolutif, en apparence. « Lire la création dans l’évolution » avait pour vocation de convaincre les croyants que leur foi ne devait pas être contrariée par une théorie scientifique de plus en plus difficile à renier. Avec le titre « Lire la création, l’évolution », la cible a changé. Le livre s’adresse à tout ceux qui veulent comprendre ces deux conceptions de l’univers, alors qu’en réalité, il reste un livre qui tente d’extraire au forceps ce que la science pourrait concéder à la religion. On est donc bien loin du fameux saut évolutif, de l’apparition d’une nouvelle espèce. Disons qu’il s’agit juste d’une nouvelle souche, un mutant !

Le véritable saut évolutif est sur la quatrième de couverture. Le prix : 80 francs (12,2€) en 1981, 22€ en 2007. Presque 100% d'augmentation. Dur, pour un livre qui n’a idéologiquement pas évolué. Mais c’est vrai qu’il est difficile de lutter contre cette redoutable pression de sélection : « l’inflation ».

19 mai 2007

Caipipirinha



"Pisser dans un violon", c'est bien connu, ne sert à rien. Par contre, "Pisser dans un glaçon" doit avoir un sens. C'est au Brésil, dans un restaurant de Rio de Janeiro, que je l'ai récemment découvert (photos). Je ne vois que deux explications à cette étrange pratique instaurée par les propriétaires de l'établissement : (1) réchauffer les glaçons, ce qui me paraît absurde (2) signifier aux clients qu'ils sont des "pisse-froids", ce qui au Brésil est peut-être un compliment. Quoi qu'il en soit, les dames pipi locales ne se contentent pas d'attendre la pièce tranquillement à la sortie. Elles viennent sans cesse remettre des glaçons dans la "caïpipirinha" !

10 mai 2007

Quelque part, oui. Mais où ?

A force d’entendre tout le monde ponctuer la moindre de ses phrases par « quelque part » j’ai fini par me demander quelle était la localisation précise de ce « quelque part ». Pas facile. Heureusement, j’ai été aidé dans cette quête, par une publication* très sérieuse de deux linguistes de l’Université de Strasbourg qui ont longuement réfléchi au sens de « quelque part ».

Chacun sait qu’habituellement, « quelque part » est un endroit bien précis que personne ne parvient à situer précisément. Il n’est pas « ici », ni « là » mais entre ici et là. Dans le dialogue qui suit, John et Barbara nous donnent un exemple de l'usage de ce «quelque part» : « Où vas-tu Barbara à cette heure avancée de la nuit ? » « Quelque part, John ! » « Mais où Barbara ? » « Cela ne te regarde pas John ». Barbara va peut être chez sa mère ou chez une vieille copine. John n’en sait donc rien. Il sait juste que cela se situe entre la mère et la vieille copine. Et entre la mère et la vieille copine, il peut aussi y avoir l’amant. Donc, avec ce « quelque part » John reste juste dans le flou.

Ca se complique sérieusement avec un autre « quelque part », celui de : « Pourquoi Barbara part à cette heure avancée de la nuit ? Quelque part, j'ai peur qu'elle ait un amant et ça me tord la nouille. » Ce « quelque part » là, quoi qu’en pense John, n’est pas dans son slip. C’est le « quelque part » de son inconscient, un pur produit de la psychanalyse. Ce genre de « quelque part » ne se trouve pas avec une carte et une boussole. Il faut au moins 20 ans de divan et quelques dizaines de milliers d’euros en espèces pour réaliser qu’il se situe entre le Ca et le Surmoi, c'est à dire entre les deux terrains vagues de l’inconscient qui entourent le Moi. Le flou est monté d’un cran, certes, mais John a botté le cul à son Œdipe. Et depuis il se sent mieux.

Reste ce dernier « quelque part » : « Si Barbara s’en va à cette heure avancée de la nuit, c’est que quelque part elle ne m’aime plus. ». Ce « quelque part » est impossible à localiser, pour la bonne est simple raison qu’il n’indique plus un lieu, même flou. Il remplace « d’une certaine manière ». Ce n’est qu’un moyen de tempérer tout le reste de la phrase. John pense que Barbara ne l’aime plus, mais d’une certaine manière il a du mal à l’accepter.

Conclusion : je pense que l’on ne s’interroge jamais assez sur le sens profond des mots. C’est parce que nous ne voulons pas vraiment savoir ce qu’ils veulent dire vraiment. Quelque part ça nous fait peur. Ils pourraient nous révéler des réalités difficiles à admettre, même si quelque part on s’en fout.

*« Quelque part : du spatial au non spatial en passant par l’indétermination et la partition. » Georges Kleiber et Francine Gerhard-Krait. French Language Studies, 16 (2006) 147-166

07 mai 2007

Le mystérieux sourire de Ségolène Royal


Ségolène Royal a perdu, avec le sourire.
Tout a été si vite dans cette soirée du deuxième tour, que personne n'avait pensé à lui défaire derrière les oreilles, les deux coutures qui lui retiennent depuis des semaines ce sourire si naturel.
Conséquence, elle a du déclarer sa défaite à la manière d'une victoire "J'ai perdu !" Avec le sourire !

Le Sarkofficiel

Nicolas Sarkozy est donc le nouveau président de la République Française. Voici déjà le portrait officiel qui devra être accroché dans toutes les mairies.

03 mai 2007

Je m'abstiens


C’est décidé, j’arrête de bolobolosopher sur la campagne présidentielle. La pensée bolobolosophique de Ségolène Royale et Nicolas Sarkozy, est largement supérieure à la mienne. Hier soir, lors du débat télévisé, je me suis senti humilié par leur maîtrise du Bolobolo, la seule langue universelle, qui je le rappelle, ne veut rien dire. Mais je reste beau joueur et vous livre ici quelques-unes des plus belles réflexions de ces deux maîtres es-bolobologie, qui très probablement alimenteront les discussions des cafés de bolobolosophie pendant des décennies. J'inscris par ailleurs ces deux personnalités sur la liste des candidats au "Bolobolo d'Or 2007"
(A noter, l'intégralité du débat est restranscrite sur Betapolitique)

D’abord deux quenelles de chiffre (précisons qu’en bolobolosophie, une quenelle de chiffre est une querelle de chiffre à la tenue un peu molle). Puis l’une des plus belles démonstration de rhétorique bolobologique sur les présidents de « ce qui marche » « ce qui ne marche pas » que l’on prendra garde à ne pas confondre avec des « présidents de ceux qui marchent » ou « de ceux qui ne marchent pas » incompatibles avec la polémique sur les enfants handicapés. Enfin, le meilleur pour la fin avec des aveux publics sur le plaisir sarko-masochiste.

Première quenelle de chiffres à propos de la récidive :

Nicolas Sarkozy « On ne peut plus continuer à avoir des individus qui viennent 50, 60 ou 70 fois devant le même tribunal. »

Ca c’est ce que l’on appelle de la bonne grosse récidive !

Ségolène Royale « Des peines adaptées, bien évidemment, au premier délit seront exécutées, car on sait bien que s’il y a une réponse au premier acte de délinquance, dans 70 % des cas, il n’y a pas de récidive. S’il n’y a pas de réponse au premier acte de délinquance, dans 70 % des cas, il y a récidive. »

Les statistiques, dans 70% des cas, ça tombe bien.

Deuxième quenelle de chiffres lors d’un échange assez vif sur la part du nucléaire en France :

Ségolène Royal : Vous défendez le nucléaire, mais vous ignorez la part du nucléaire.

Nicolas Sarkozy : Non. La moitié de notre électricité est d’origine nucléaire.

Ségolène Royal : Non, 17% seulement de l’électricité.

En fait, c’est 78 % et non 17 % selon Ségolène Royale ou 50 % selon Nicolas Sarkozy.

Président de ce qui marche

Ségolène Royal : Car je connais les sujets dont je parle et je sais que ce que je dis, je le réaliserai car je le vois fonctionner sur les territoires. Je suis allée dans les autres pays voir ce qui marche. Je serais la Présidente de ce qui marche, sans œillères, en regardant tout ce qui peut fonctionner. Je crois que je pourrai, ainsi, redébloquer la machine économique.

Nicolas Sarkozy : Si vous êtes la Présidente de ce qui marche, je veux être le Président qui fasse que ce qui ne marche pas marche, car si c’est pour être la Présidente de ce qui va, il n’y a pas de problème, les gens ne votent pas pour nous, pour que l’on complique ce qui va. Au contraire, ils votent pour que l’on répare ce qui ne va pas.


Et pour terminer, les aveux sur le plaisir sarko-masochiste :

Nicolas Sarkozy : Vous n’avez pas besoin d’être méprisante pour être brillante.

Ségolène Royal : Je connais vos techniques. Dès que vous êtes gêné, vous vous posez en victime.

Nicolas Sarkozy : Avec vous, ce serait une victime consentante !

Ségolène Royal : Tant mieux, au moins, il y a du plaisir.

Il y a de l'électricité dans l'air. Et cette fois, c'est pas du nucléaire !


Face à ces deux brillants agrégés de bolobolosophie, je ne peux que m’abstenir…